Est-ce que les victimes d’AVC peuvent parvenir à temps aux traitements?

Comment la cartographie nous a permis de révéler l’impact de la géographie sur l’accessibilité aux soins d’urgence en cas d’AVC
 Ferme sur route rurale

Les cellules cérébrales meurent au rythme de 1,9 million par minute après un AVC en l’absence de traitement. Pour mettre les choses en perspective, votre peau se débarrasse d’environ un million de cellules chaque jour, mais sur une période de 24 heures. Certes, les cellules de la peau sont importantes, mais ce ne sont pas celles qui vous permettent de bouger, de parler ou de penser.

L’AVC est une urgence. On compte environ 62 000 cas au pays chaque année, soit un toutes les neuf minutes. Près de 20 % des victimes meurent dans les 30 jours qui suivent l’AVC.

Plus une victime d’AVC arrive tôt à l’hôpital, plus ses chances de survie sont élevées, et meilleurs seront les résultats obtenus lors de son rétablissement. Or, trop de personnes n’obtiennent pas de traitement à temps. Nous voulions savoir pourquoi.

Nous avons commencé notre étude en nous demandant si la géographie du Canada faisait obstacle. Notre pays compte des centaines de centres d’urgence qui peuvent traiter les victimes d’AVC : sur les 638 hôpitaux au pays, 119 sont des centres de traitement de l’AVC offrant des tomodensitogrammes et des agents thrombolytiques, et 42 sont des centres de soins avancés et complets qui possèdent une unité dédiée à cette affection.

Avec quelle facilité les victimes parviennent-elles à de tels centres? Pour trouver la réponse, nous avons cartographié les 161 centres de soins avancés et complets ainsi que l’emplacement des postes d’ambulances, et nous les avons analysés en fonction de toutes les adresses résidentielles du dernier recensement. Nous avons ensuite pris en compte les routes, les limites de vitesse et l’accès aux autoroutes.

Les conclusions sont encourageantes

L’étude a révélé qu’en dépit de l’immensité du pays, plus de 85 % des personnes vivent dans un rayon de 6 heures d’un centre spécialisé en AVC, par accès routier. Cela signifie que les services médicaux d’urgence (SMU) peuvent transporter la plupart de ces personnes à temps pour recevoir des traitements vitaux.

L’agent thrombolytique t-PA rétablit la circulation du sang dans le cerveau et peut atténuer les effets de l’AVC, mais il ne fonctionne que s’il est administré dans les quatre heures et demie suivant les premiers symptômes. Les autres traitements de pointe, comme la thérapie endovasculairequi détruit les caillots sanguins, permettent de prolonger le délai pour le traitement à au moins six heures. L’accès à ces traitements avancés est limité, car ils nécessitent l’intervention de médecins et de matériel spécialisés.

Le temps nécessaire pour accéder aux centres de soins de l’AVC varie d’une province à l’autre, et, comme on peut s’y attendre, l’accessibilité est moindre dans les provinces essentiellement rurales, où les résidents sont dispersés.

Des possibilités d’élargir l’accès aux soins

Même si les résultats de l’étude indiquent que la plupart des personnes seraient en mesure d’atteindre un centre à temps, d’autres facteurs peuvent avoir un impact sur l’accès au traitement de l’AVC dans les meilleurs délais, comme la reconnaissance des signes et la réaction.

La géographie, le relief difficile et le climat du pays expliquent l’impossibilité de transporter tous les patients à l’hôpital dans les temps exigés pour le traitement, même si l’amélioration des systèmes conduit à une réduction de ce délai. En général, les habitants des régions rurales et éloignées éprouvent des difficultés à accéder aux SMU pour toutes situations. De plus, les services ambulanciers doivent suivre certaines règles qui entravent leur capacité à franchir certaines limites territoriales.

Une telle accessibilité limitée a également été observée pour des cas d’urgence cardiaque et de soins de traumatologie.
C’est l’occasion de poursuivre l’évolution amorcée dans les systèmes coordonnés de soins et les accords de contournement pour les ambulances afin d’assurer un accès optimal aux services d’urgence pour l’AVC.

À partir de là, nous pouvons collaborer avec les provinces pour améliorer l’accessibilité et la communication, déterminer potentiellement plus de communautés qui tireront avantage de tels centres d’urgence, et travailler à l’amélioration des taux de survie pour toute la population.

L’importance de reconnaître l’AVC

Nous avons constaté que la survie à un AVC résulte d’une courte chaîne d’événements qui se passent rapidement. La victime ou un témoin doit reconnaître les signes de l’AVC et composer le 9-1-1 ou le numéro d’urgence local.

De là, il s’agit d’acheminer la victime au bon hôpital – qui possède l’équipement nécessaire pour le traitement de l’AVC – à temps, et de faire en sorte que le centre de soins soit prêt à traiter le patient dès son arrivée. La planification de ces étapes et le fait d’éviter les délais sont essentiels, non seulement pour assurer la survie du patient, mais aussi pour obtenir les meilleurs résultats possible lors du rétablissement.

Il faut retenir que lorsqu’il s’agit d’un AVC, les conditions au départ ont un impact sur le résultat final.

Au pays, le principal obstacle à la survie vient du fait que les gens ne reconnaissent pas les signes de l’AVC, ou n’y réagissent pas assez vite. Si vous ou une autre personne présentez ces signes, composez immédiatement le 9-1-1.

Ce qui est incroyable, c’est qu’il est possible de sauver plus de vies en cas d’AVC. Cette étude indique la voie à suivre pour améliorer le taux de survie pour toute la population.

La Dre Patrice Lindsay est coauteure de cette étude et directrice, AVC, à Cœur + AVC. L’étude est publiée dans CMAJ Open.

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