« Ces gens ont changé ma vie. »
Chapitre 1 Colère et confusion
« Je me demandais constamment ce que je faisais là. »
Pour Paul Goldberg, les premiers mois de réadaptation cardiaque semblaient pires que l’attaque à laquelle il avait récemment survécu.
À 50 ans, Goldberg était le père de deux jeunes filles pleines d’entrain. Il était propriétaire d’une entreprise de construction prospère et était gardien de but dans une ligue de hockey amateur.
Autrement dit, il ne se sentait pas du tout à sa place aux côtés d’aînés de 70 et 80 ans qui participaient avec lui à des séances de thérapie de groupe.
« J’étais de loin le plus jeune, se souvient-il. Je pensais que je n’avais rien à voir avec eux. »
En réalité, Paul ne pouvait plus faire dix pas sans s’arrêter pour reprendre son souffle. Depuis sa crise cardiaque, chaque effort lui donnait l’impression qu’il allait s’effondrer.
« J’étais complètement affaibli », dit-il.
Paul a plus tard appris que son malaise était en grande partie causé par sa médication. Les bêtabloquants sont souvent utilisés pour ralentir le pouls des victimes de crise cardiaque, mais ceux prescrits à Paul fonctionnaient trop bien : ils ralentissaient son rythme cardiaque à tel point que son corps ne recevait plus assez d’oxygène, une condition qui affectait aussi grandement son humeur.
« J’ai eu des idées suicidaires au cours de cette période, admet-il. Les médicaments et ma situation me rendaient vraiment très dépressif. »
Paul a été réadmis à l’hôpital à quelques reprises avant que les docteurs ne trouvent la bonne prescription. « Ils ont réalisé que je faisais partie du 1 % des patients qui ne réagissent pas bien à ce type de bêtabloquant », explique-t-il en disant espérer que la recherche aidera à prévenir ces situations.
« Les choses se sont replacées dès que j’ai eu les bons médicaments. C’était comme si quelqu’un avait appuyé sur un bouton, j’ai senti une énorme amélioration. »
Il prenait du mieux, mais il lui restait encore à remonter la pente psychologique, une étape beaucoup plus difficile à réaliser qu’appuyer sur un simple bouton.
Chapitre 2 Passer à l’attaque
« Il était environ 22 h et je regardais les Blue Jays perdre contre les Yankees à la télé, se souvient-il. Avant d’aller dormir, je me suis levé pour me brosser les dents et, tout d’un coup, j’ai eu l’impression que quelqu’un m’enfonçait un couteau dans la poitrine. »
Quelques mois plus tôt, Paul avait vu son médecin après avoir été particulièrement essoufflé en faisant du sport. Il avait passé une épreuve d’effort, mais les résultats étaient normaux.
« Avec arrogance, j’ai ignoré le fait que d’un côté de ma famille, certaines personnes souffraient de problèmes cardiaques. Je ne fumais pas. Je ne buvais pas. J’étais sportif. Je ne pouvais pas prévoir que mon artère principale allait complètement se bloquer. »
Pour les équipes médicales, évaluer le risque de maladie cardiaque chez une personne n’est pas tâche facile. Des recherches de pointe financées par Cœur + AVC pourraient toutefois remédier à la situation. À l’Université McMaster de Hamilton, en Ontario, le Dr Guillaume Paré cherche à prédire les prédispositions des patients aux maladies vasculaires d’après leur code génétique. Ses travaux pourraient un jour aider à prévenir les cas dévastateurs comme celui de Paul.
Allongé dans la salle de rétablissement de l’hôpital après sa crise cardiaque, Paul était abasourdi. « Le docteur m’a dit qu’il ne me restait plus que 25 minutes à vivre après mon arrivée. Je n’arrivais pas à y croire. Je pensais avoir fait la bonne chose en allant voir mon médecin six mois plus tôt. J’avais fait tout ce qu’il fallait. J’étais en colère, c’est le moins que je puisse dire. »
Avant cet événement, Paul avait toujours tiré fierté de son indépendance. « Et tout d’un coup j’étais forcé de compter sur les autres. Je ne voulais pas que ça m’arrive. J’étais confus. Et fâché. »
Chapitre 3 Sur la bonne voie
Les choses ont commencé à changer environ sept semaines après le début de son programme de réadaptation cardiaque. Ce jour-là, un travailleur social a séparé les patients en petits groupes. « J’avais entendu parler de cet exercice parce qu’un de mes amis, qui avait eu une crise cardiaque à peu près au même âge que moi, avait abandonné le programme à ce moment-là. » La situation s’apprêtait en effet à devenir beaucoup plus émotive parce que les participants devaient s’ouvrir les uns aux autres.
Paul a accepté de jouer le jeu.
Il a partagé sa vie personnelle et parlé du stress qu’il éprouvait. « Au cours du processus, j’ai réalisé à quel point j’avais rencontré des gens extraordinaires », dit-il, la voix remplie d’émotion.
« J’étais là, à 50 ans, en train de me plaindre de ma situation alors que l’homme de 75 ans à côté de moi était forcé d’être plongeur dans un restaurant pour faire vivre sa famille malgré sa crise cardiaque. C’est en m’ouvrant à ces gens-là que j’ai fini par accepter où j’en étais. »
Trois ans après son accident, Paul a enfin compris pourquoi il a persisté dans le processus de réadaptation cardiaque. « Ces événements m’ont appris à devenir un meilleur père. J’aime être en contrôle et je dois souvent jongler avec plusieurs choses en même temps, mais j’ai appris à être plus détendu. Je ne m’en fais plus pour les petits détails. Ça m’a donné le goût de mieux profiter de la vie. »
Et de combattre sa maladie cardiaque.
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