Le gouvernement fédéral s’est engagé à limiter la publicité pour des aliments et des boissons à faible valeur nutritive auprès des enfants, mais n’a pas encore tenu sa promesse. Carol Dombrow, une nutritionniste de Cœur + AVC, explique les raisons pour lesquelles il est urgent d’agir.
En quoi consiste la publicité visant les enfants?
La frontière entre le divertissement et la publicité visant les enfants est souvent floue, puisque du contenu publicitaire apparaît parfois en pleine séance d’apprentissage ou de jeu des enfants. Chaque année, l’industrie nationale des aliments et des boissons consacre 1,1 G$ à la publicité de ses produits auprès des enfants : ces derniers verraient 1500 publicités en 1 an sur les médias sociaux seulement. La publicité visant les enfants est beaucoup plus intégrée, sophistiquée et interactive qu’il y a 10 ou 15 ans.
Dans le secteur des aliments et boissons, les spécialistes du marketing utilisent des éléments efficaces pour cibler les enfants, notamment ceux ci-dessous.
- Des personnages de dessins animés sur des boîtes de céréales à déjeuner sucrées
- Du placement de produits en magasin à la hauteur des yeux des enfants
- Des publicités télévisées au cours d’émissions pour enfants
- Du placement de produits dans des films, des dessins animés ou des émissions de télévision destinés aux enfants
- La commandite de programmes et de matériel pédagogique destinés aux enfants
- La publicité dans le cadre de jeux vidéo et d’émissions en ligne
- La publicité sur des machines distributrices
- La publicité sur des sites Web et des médias sociaux
Ces tactiques publicitaires sont-elles vraiment efficaces?
Bien sûr! Non seulement la publicité attire les enfants, mais elle les fidélise à une marque et influence leurs choix alimentaires. Des études indiquent que dès l’âge de trois ans, les enfants peuvent reconnaître ou nommer des marques d’aliments et de boissons, et en avoir une préférée. Les enfants influencent même les emplettes de leurs parents en les poussant à acheter certains aliments.
Pourquoi devons-nous restreindre la publicité visant les enfants?
Beaucoup de publicité visant les enfants porte sur des aliments et des boissons à faible valeur nutritive. Par exemple, plus de 50 millions de publicités sur des aliments et des boissons apparaissent chaque année sur les 10 principaux sites Web destinés aux enfants. Or, 90 % de ces publicités portent sur des aliments ultra-transformés comme des boissons gazeuses, des céréales à déjeuner sucrées, des biscuits et des croquettes de poulet. Actuellement, plus de la moitié de l’apport calorique des enfants et des jeunes au pays provient d’aliments ultra-transformés à teneur élevée en sel, en sucre et en gras saturés. Un tel régime alimentaire exclut les aliments riches en nutriments comme les légumes, les fruits, les grains entiers et les aliments protéinés dont nos enfants ont besoin pour se développer, en plus d’augmenter leurs risques de maladies du cœur, d’AVC et de cancer plus tard au cours de leur vie.
Des restrictions sévères contribueraient à protéger les enfants des stratégies de marketing manipulatrices utilisées pour vendre des produits à faible valeur nutritive. Elles aideraient aussi les parents à faire de meilleurs choix alimentaires pour leurs enfants.
Des restrictions sur la publicité visant les enfants sont-elles en vigueur au pays?
Oui. Depuis 1980, une loi au Québec interdit toute publicité commerciale visant les enfants de moins de 13 ans.
Dans la province, cette loi a permis d’augmenter la consommation de fruits et de légumes et de diminuer le taux d’obésité chez les enfants de 6 à 11 ans jusqu’à des niveaux records au pays. Malgré cela, les restrictions sur la publicité au Québec ont quelques failles.
Il y a près de 25 ans, l’industrie des aliments et des boissons a établi ses propres normes pour restreindre la publicité de certains de ses produits auprès des enfants. Toutefois, l’adhésion à ces normes se fait sur une base volontaire et certaines entreprises ne s’y conforment pas. Une recherche réalisée au pays a révélé que cet effort volontaire est inefficace.
En juillet 2023, l’industrie de la radiodiffusion et celle des aliments et des boissons ont mis en place un code dont le contenu est semblable aux restrictions en vigueur au Québec, mais il n’est pas à la hauteur.
En somme, selon des recherches menées dans le monde entier et les dernières recommandations de l’Organisation mondiale de la Santé, il s’avère que les normes volontaires ne sont pas efficaces pour protéger les enfants contre la publicité sur les aliments et boissons à faible valeur nutritive.
Pourquoi Cœur + AVC milite-t-elle pour ce type de changement?
Cœur + AVC demande au gouvernement fédéral d’adopter un règlement complet pour restreindre la publicité de certains aliments et boissons auprès des enfants de moins de 13 ans, et ce, pour les raisons suivantes :
- Les aliments ultra-transformés ne font pas partie d’une alimentation saine en vertu du Guide alimentaire canadien et ils sont liés à une hausse des maladies du cœur, des AVC, du diabète et des cancers.
- En interdisant la publicité de boissons et d’aliments à faible valeur nutritive visant les enfants, nous protégeons ceux-ci et soutenons leurs parents, qui les guident dans l’adoption d’habitudes et de préférences alimentaires saines.
- La publicité d’aliments et de boissons à faible valeur nutritive s’adressant aux enfants est persuasive. Les familles ont besoin du soutien d’un règlement complet qui s’applique là où les spécialistes du marketing rejoignent les enfants.
- La population appuie ce changement! Selon un récent sondage, 71 % des citoyens sont favorables à ce que le gouvernement fédéral interdise la publicité sur des aliments et des boissons à teneur élevée en sel, en sucre et en gras saturés auprès des enfants de moins de 13 ans.
L’équipe de Cœur + AVC espère donc que le gouvernement fédéral agira rapidement pour respecter son engagement de longue date de restreindre la publicité visant les enfants dans le cadre de la mise en œuvre de la Stratégie en matière de saine alimentation du Canada.
Consultez l’énoncé de position sur la publicité visant les enfants de Cœur + AVC.