Une femme enceinte fait mesurer sa tension artérielle au cabinet du médecin

Des projets de recherche novateurs sauveront des femmes

La Dre Kara Nerenberg étudie des signes durant la grossesse qui déterminent le risque futur de crise cardiaque ou d’AVC d’une femme

Chapitre 1 Les femmes sont à risque

La Dre Kara Nerenberg n’aime pas les surprises. Elle n’aime particulièrement pas lorsqu’une femme dans la cinquantaine ou la soixantaine subit un AVC ou reçoit un diagnostic de maladies du cœur inattendu.

La Dre Nerenberg veut prévenir de telles surprises en cherchant des signes cardiovasculaires précurseurs plus tôt dans la vie des femmes. Dans le cadre de ses recherches à l’Université de Calgary, elle se concentre sur la grossesse et la voit comme une occasion d’évaluer les facteurs de risque des femmes et de prendre des mesures pour prévenir un éventuel AVC ou une maladie du cœur.

Pourquoi la grossesse? « Il s’agit d’une période où les femmes sont véritablement en interaction avec le système de santé », affirme la Dre Nerenberg, qui est titulaire de la Chaire sur la santé cardiaque et cérébrale des femmes pour chercheur en milieu de carrière de Cœur + AVC.

« Nous savons aussi que plusieurs maladies courantes qui surviennent pendant la grossesse augmentent le risque futur de maladie cardiovasculaire d’une femme », ajoute-t-elle.

Elle cite notamment les problèmes liés à l’hypertension artérielle durant la grossesse, comme la prééclampsie et l’hypertension gestationnelle. Les femmes qui sont touchées par ces maladies ont un risque quatre fois plus élevé de présenter des problèmes chroniques liés à la pression artérielle. Elles sont aussi 2 fois plus à risque de subir une crise cardiaque ou un AVC. Les autres complications liées à des risques ultérieurs comprennent le diabète de grossesse et les accouchements prématurés.

Les enjeux sont majeurs : on estime que 15 % à 20 % des femmes au pays développeront au moins un de ces problèmes de santé durant la grossesse.

Chapitre 2 Le dépistage est la clé

Afin de changer les résultats en matière de santé des femmes, la Dre Nerenberg a dirigé un programme de recherche intitulé IMPROVE (Identifying Methods for Postpartum Reduction of Vascular Events [Trouver des méthodes pour réduire le risque d’événements vasculaires après une grossesse]), qui s’est terminé en 2022.

Dans le cadre du programme IMPROVE, les chercheurs se sont penchés sur les interactions des femmes avec le système de santé et sur la fréquence des dépistages du cholestérol et du diabète après qu’elles ont eu un bébé. Dans un deuxième temps, ils ont voulu déterminer si un programme de suivi particulier pourrait aider ces mères à réduire leurs facteurs de risque liés aux maladies du cœur dans les dix ans suivant la naissance de leur bébé.

« Nous croyons vraiment que nous pourrions prévenir des problèmes cardiovasculaires ultérieurs en effectuant un dépistage précoce pour les facteurs de risque cardiovasculaire, et en mettant en place des méthodes de prise en charge et de prévention tôt après la grossesse », affirme la Dre Nerenberg.

Docteur Karen Nerenberg

Dans le programme de recherche de la Dre Nerenberg, on a examiné à quelle fréquence les femmes faisaient l’objet d’un dépistage de facteurs de risque précoces après une grossesse, comme le taux de cholestérol et le diabète.

D’après elle, on ne comprend pas encore très bien le lien entre les complications liées à la grossesse et les maladies du cœur et l’AVC. Certaines femmes sont plus susceptibles de présenter des facteurs de risque connus comme l’hypertension artérielle, un taux de cholestérol élevé et l’obésité.

« Nous avons aussi découvert que durant la grossesse, ces problèmes de santé endommagent les vaisseaux sanguins de la mère, et ce, de la tête aux orteils », indique la Dre Nerenberg. Les dommages ainsi causés peuvent provoquer ou accélérer l’accumulation de plaque dans les artères, ce qui peut entraîner des maladies du cœur ou un AVC.

Chapitre 3 Au-delà de la biologie

Pour la Dre Nerenberg, la biologie des maladies du cœur n’est qu’un des facteurs qu’il faut mieux comprendre. Elle est aussi préoccupée par les obstacles qui peuvent empêcher les femmes d’avoir accès à des soins médicaux, y compris les rôles liés au genre, comme s’occuper des enfants ou de parents âgés, l’origine ethnique et le statut socio-économique.

« Il est important de regarder au-delà des modèles établis pour les maladies cardiovasculaires et de commencer à étudier les façons d’utiliser les déterminants sociaux de la santé et les facteurs intersectionnels afin de mieux comprendre la biologie, mais aussi personnaliser les soins de santé », affirme-t-elle.

La Dre Nerenberg a participé à la création du Canadian Post-Pregnancy Clinical Network, un réseau qui relie 20 cliniques de partout au pays. Le but de ce groupe consiste à établir les meilleures pratiques pour prendre soin des femmes enceintes et des nouvelles mères atteintes d’hypertension artérielle. La publication de ces lignes directrices cliniques est prévue pour la fin 2022.

La Dre Nerenberg a aussi développé un système de surveillance provincial en Alberta qui a notamment permis de constater une augmentation importante des cas de prééclampsie au cours des dix dernières années.

Elle est très reconnaissante du soutien offert par les donateurs de Cœur + AVC. Ces dons lui permettent de découvrir de meilleures façons d’aider ses patients, ainsi que ceux de partout au pays. « Il est très important de recevoir du financement d’organismes comme Cœur + AVC. Cela envoie le message aux chercheurs que leurs recherches sont importantes. Je suis vraiment fière et reconnaissante », indique la Dre Nerenberg.