Cœur

Le risque en héritage

Pendant sa grossesse, Carissa a reçu un diagnostic qui révélait un problème plus grand – un problème qu’elle réussirait à contrôler plus tard, avec le soutien de sa famille.

Chapitre 1 Un diagnostic déroutant

Carissa est tombée enceinte à l’âge de 18 ans. Mis à part les éléments stressants qui peuvent submerger les jeunes mères, elle se sentait capable et forte physiquement. Cependant, elle a reçu un diagnostic de prééclampsie entre la 25e et la 27e semaine de grossesse. « Je n’avais même pas pensé à faire une recherche sur Google sur le sujet à ce moment-là, dit-elle. Ça m’apparaissait plus comme un inconvénient que quelque chose à craindre. » Elle a donc continué à occuper deux emplois et à se concentrer sur sa carrière.

À la suite d’un examen de routine à la 30e semaine de sa grossesse, Carissa a été hospitalisée pendant 7 jours parce que sa tension artérielle était très élevée. Elle était désorientée et elle ne savait pas ce que cela signifiait pour elle et pour son bébé. Elle se rappelle avoir entendu dire qu’il y avait « trop d’acides aminés dans son urine », mais ne comprenait pas ce que cela voulait dire.

Ce n’est pas quelque chose qui arrive seulement pendant votre grossesse. Vous devez en être consciente par la suite également.
Carissa

Carissa a eu un suivi rapproché pour sa prééclampsie pendant tout le reste de sa grossesse. Elle a dû être provoquée à la 37e semaine en raison du risque élevé associé à cette affection. Elle a été en travail pendant deux jours, mais a finalement subi une césarienne d’urgence. « La tête de mon bébé était enflée », se rappelle Carissa. C’est à ce moment-là que la peur l’a envahie.

Tout de suite après la naissance de son fils, Jayden, Carissa a été hospitalisée une autre semaine. Pour la première fois, on lui a fait part du risque qu’elle subisse un AVC ou qu’un de ses organes cesse de fonctionner normalement. « C’est seulement durant et peu après l’accouchement que j’ai vraiment compris la gravité du diagnostic », dit Carissa. Elle s’est demandé si l’hypertension artérielle pouvait avoir des répercussions plus importantes – quelque chose qui reviendrait la hanter.

Chapitre 2 « Quels facteurs de risque? »

En repensant à cette période mouvementée de sa vie, Carissa a réalisé qu’elle avait été laissée à elle-même pour comprendre une maladie grave. Étant très jeune au moment du diagnostic, elle ne savait pas quelles questions poser ni comment défendre ses droits. De plus, à ce moment-là, elle était davantage préoccupée par le futur de son bébé. Plutôt que de lui parler de ses facteurs de risque particuliers et de lui expliquer comment vivre avec sa maladie, l’équipe de soins lui a donné un minimum d’informations, puis elle a reçu son congé de l’hôpital. « Cela arrive beaucoup plus souvent aux femmes, affirme Carissa. et encore plus aux femmes de couleur ».

Carissa, accompagnée de sa mère, Paula (à droite), et de sa grand-mère, Hester (à gauche).

Carissa, accompagnée de sa mère, Paula, et de sa grand-mère, Hester. Pour Carissa, le soutien de sa famille était essentiel à son rétablissement.

Carissa, accompagnée de sa mère et de sa grand-mère

L’hypertension a causé du tort aux femmes de la famille de Carissa pendant des générations. À présent, elles combattent – ensemble.

Le racisme systémique envers les personnes noires est une autre source de stress à laquelle les femmes noires doivent faire face, en plus de tout le reste : les responsabilités liées à la maternité, les inégalités en matière de rémunération, les stéréotypes comme celui de la « femme noire forte et en colère », le syndrome de l’imposteur, le fait d’être régulièrement écartée des possibilités d’avancement professionnel, etc. Tout cela augmente le niveau de stress et fait en sorte qu’une maladie préexistante, comme l’hypertension artérielle, est plus susceptible de se développer. Au sein des communautés ethniques, les femmes noires ont présenté l’augmentation la plus importante des cas d’hypertension, passant de 20 % en 2001 à 27 % en 2012.

La mère de Carissa a reçu un diagnostic d’hypertension à l’âge de 50 ans. Au retour d’un voyage en famille à l’été 2023, elle a contracté un virus qui l’a épuisée au point qu’il lui était difficile de marcher à l’aéroport. Sa tension artérielle était de 210/130 – signe d’une crise hypertensive. On l’a amenée directement à l’urgence. « C’était très effrayant à voir », affirme Carissa.

Carissa est une Canadienne de deuxième génération. Sa grand-mère a émigré de Sainte-Lucie alors qu’elle était une jeune mère de 18 ans. Elle a dû surmonter des obstacles liés au racisme systémique envers les personnes noires tout en élevant quatre enfants dans le but de leur offrir un avenir meilleur. Sa grand-mère a reçu un diagnostic d’hypertension à l’âge de 39 ans. « Ma mère, ma grand-mère et moi parlons souvent des facteurs de stress qui ont mené au développement précoce de l’hypertension. Nous avons toutes les trois un tensiomètre à la maison et nous nous assurons de mener un mode de vie sain grâce à une approche holistique du bien-être. »

Chapitre 3 Reprendre sa santé en main

Alors que Carissa était âgée de 33 ans, sa tension artérielle est redevenue élevée et elle a reçu un diagnostic officiel d’hypertension, ainsi que d’asthme et d’apnée du sommeil. Cette fois-ci, sachant que sa mère et sa grand-mère étaient aussi atteintes d’hypertension, elle a pris des mesures pour contrôler sa tension artérielle, notamment en perdant 80 livres.

« J’ai décidé de m’attaquer aux éléments sur lesquels j’ai du pouvoir. Je prenais ma tension artérielle périodiquement. J’ai commencé à manger mieux, à bouger plus et à gérer mon stress », affirme Carissa. Grâce à ses efforts, son asthme et son apnée du sommeil ont disparu, mais elle doit encore faire attention à sa tension artérielle, car elle sait qu’elle est à risque. « J’aimerais pouvoir l’ignorer, mais je ne peux pas. C’est ma réalité. »

« Ce qui est arrivé à ma mère ne fait que confirmer les raisons pour lesquelles j’essaie de prendre ma santé en main. Je fais très attention à ce que je fais et à ce que je mange. Je suis encore jeune. J’aime penser qu’il me reste encore de nombreuses années à vivre », affirme Carissa.

Même si elle a un mode de vie sain et gère bien son stress, Carissa sait qu’elle devra, tôt ou tard, commencer à prendre des médicaments contre l’hypertension. Mais pas tout de suite. « Je suis trop jeune pour commencer à prendre des médicaments pour le reste de ma vie », dit-elle.

Il y a une chose qu’elle aimerait que les autres femmes sachent : « Ce n’est pas quelque chose qui arrive seulement pendant votre grossesse. Vous devez en être consciente par la suite également, car lorsque vous recevez un diagnostic d’hypertension, vous devez surveiller votre tension artérielle pendant le reste de votre vie. »

Carissa et son fils Jayden, maintenant âgé de 16 ans, vivent à Ottawa, sa ville natale. Ils se rendent souvent à Toronto pour visiter la grand-mère (53 ans) et l’arrière-grand-mère (74 ans) de Jayden. Carissa et sa famille veulent sensibiliser d’autres femmes à leurs propres facteurs de risque et les encourager à prendre leur santé en main.